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L'ÉCHO DES MURAILLES, L'ÉCHO DES ENTRAILLES. Une installation murale en pratique relationnelle de Nadia Nadege, artiste qui a permis la création de ce blogue pour un échange entre femmes vers leur meilleure conscience identitaire...
LE CORPS-MESSAGER Les Marcheurs de Vie est une autre installation en pratique relationnelle de la même artiste, qui fait suite aux poupées de tissu par des figurines de plâtre.

Guérir la blessure d'abandon - 15



GUÉRIR LA BLESSURE D'ABANDON (suite)
Par DANIEL DUFOUR
Extraits de son livre La blessure d'abandonLes Éditions de l'Homme, 2007

S'accorder le droit d'avoir des émotions, de les ressentir et de les exprimer

Nous avons vu que l'abandonnique a de la difficulté à s'autoriser à ressentir de la tristesse, qu'il a tendance à la minimiser en disant qu'elle a peu d'importance et qu'elle est insuffisante pour qu'il pleure. L'abandonnique va avoir encore plus de difficulté à reconnaître la colère qu'il éprouve envers une personne aussi proche et importante que sa mère, son père, ou ceux qui lui ont servi de parents. Il n'est en effet pas concevable de nourrir une colère aussi forte envers des gens que l'on est censé respecter et aimer. Ressentir de la colère est équivalent à se conduire comme un individu égoïste, ingrat, qui n'a même pas, comme le dit l'expression populaire, la "reconnaissance du ventre".

Bref, l'abandonnique va se servir de tous les arguments issus de son mental pour se refuser le droit d'être en colère. Une façon d'aider la personne souffrante à accepter sa colère consiste à lui rappeler que les émotions que nous ressentons vis-à-vis de ceux qui nous entourent, tels que nos parents, nos frères et sœurs, notre femme ou notre mari, et nos enfants, sont forcément plus fortes que celles que nous ressentons vis-à-vis de personnes étrangères. Il est par conséquent "logique" que nos joies, nos tristesses et nos colères soient également plus fortes envers ces personnes que celles que nous nourrissons envers d'autres personnes qui ne nous touchent pas d'aussi près.

Il est capital que l'abandonnique s'accorde le droit d'être en colère et triste d'avoir été abandonné. Toute son éducation ainsi que tout son vécu lui ont refusé ce droit jusqu'à présent. Et il est essentiel qu'il se donne ce droit plutôt que de l'attendre des autres, ce qui est son premier réflexe. Il a en effet tendance à désirer en parler à l'autre afin que ce dernier l'approuve et lui donne raison de ressentir cette émotion. Or, il est évident que l'autre soit ne va pas lui reconnaître ce droit, soit va le lui reconnaître mais en le minimisant et en lui demandant d'en faire autant: "Je comprends que tu sois en colère, mais pas à ce point!" De plus, l'autre va souvent disposer d'excuses convaincantes, et réelles pour lui, qui risquent fort de faire replonger la personne souffrante dans son refus de ressentir les émotions liées à ce qu'elle a vécu.

Dans tous les cas de figure, l'abandonnique va devoir faire taire son mental afin de se laisser vivre tel qu'il est et de s'autoriser à ressentir des émotions de colère et tristesse. C'est un grand travail d'Amour de lui-même qui lui est demandé, d'autant plus difficile qu'il n'a pas eu pour habitude de s'accorder beaucoup d'amour jusqu'à ce jour. Il va par conséquent falloir qu'il soit patient avec lui-même et s'attende à ce que sa progression vers la guérison soit parfois cahotante et le conduise temporairement à la rechute.

Guérir la blessure d'abandon - 14




GUÉRIR LA BLESSURE D'ABANDON (suite)
Par DANIEL DUFOUR
Extraits de son livre La blessure d'abandonLes Éditions de l'Homme, 2007

C'est au fur et à mesure que le mental de l'enfant se développe que les crises de rage apparaissent dans sa vie. En effet, sous la pression de l'éducation et des règles lui interdisant de se mettre en colère (des règles nourrissant le mental), l'enfant va réprimer sa colère, jusqu'au moment où, n'en pouvant plus, il explose et fait une crise de rage, ce qui est fort violent et destructeur. Juste après, l'enfant se sent coupable et s'excuse, il essaie de se contrôler et réprime encore plus ce qu'il ressent, jusqu'à la prochaine fois ...

Nous sommes ici dans un cercle vicieux dirigé et animé du début jusqu'à la fin par le mental. Il en va bien entendu de même pour l'adulte parent qui fait subir des crises de rage à son entourage et marque ainsi à vie ses enfants. Cette rage n'a rien à voir avec la colère dont l'expression, comme nous le verrons, ne porte atteinte à l'intégrité physique et psychique de personne et se fait dans la solitude à seule fin de se faire du bien.

Il est souvent utile d'expliquer tout cela à l'abandonnique afin qu'il comprenne que la colère est dénuée de toute violence et qu'il est absolument normal, et même nécessaire, qu'un être humain ressente cette émotion. Néanmoins, la personne préfère la plupart du temps d'autres termes qui sont moins"chargés", tels que"rogne", "contrariété", "énervement", "exaspération", "ressentiment". Le choix des mots importe peu, pourvu que l'individu accepte de reconnaître qu'il éprouve une émotion de la famille des colères face à ce qu'il a subi. Reconnaître qu'avoir été rejeté ou abandonné puisse engendrer de la tristesse et de la colère est en soi une étape importante sur le chemin de la guérison, mais ne veut pas dire pour autant que l'abandonnique s'accorde le droit de ressentir ces émotions ...

Guérir la blessure d'abandon - 13



GUÉRIR LA BLESSURE D'ABANDON (suite)
Par DANIEL DUFOUR
Extraits de son livre La blessure d'abandonLes Éditions de l'Homme, 2007

Reconnaître les émotions liées à l'abandon

Du fait de notre mental, le mot"abandon", ou ses synonymes, peut rester un simple mot et n'être relié à aucune émotion. Je suis toujours étonné de notre capacité à prononcer des mots sans ressentir du tout l'émotion qui se trouve derrière. L'abandonnique ne fait pas exception à cette règle. Après avoir accepté intellectuellement qu'il a été quitté ou abandonné par l'autre, il a l'impression (ou il fait semblant!) d'en avoir terminé avec son traitement. Il n'en est évidemment rien, car une reconnaissance intellectuelle n'est en aucun cas synonyme de mieux-être... Il va donc falloir que la personne souffrante se pose la question de ce qu'elle ressent comme émotion.

Que peut-on ressentir lorsque l'on est abandonné ou que l'on se sent abandonné? Le mot "ressentir" est très souvent interprété par la personne comme une invitation à dire ce qu'elle pense du fait qu'elle a été abandonnée. Elle va par conséquent partir dans une grande diatribe sur ce qu'elle pense ou ne pense pas par rapport à cet acte. Si elle réalise que la question posée ne concerne pas ce qu'elle pense, mais bien ce qu'elle ressent un silence règne souvent, car pas plus que la plupart d'entre nous elle n'est habituée à se pencher sur ses émotions, trop occupée à réfléchir avec son brillant mental.


Après ce moment de silence, un autre type de réponse est parfois fait: "Je me sens abattu, fatigué" ou "Je suis sans ressort, comme épuisé", ou encore: "Je me sens démotivé." Il arrive aussi que la personne décrive ce dont elle souffre sur le plan physique... La question s'impose alors naturellement: "Que ressentez-vous?" Deux réponses sont possibles, car il n'y a pas pléthore de familles d'émotions: la tristesse ou la colère. En se penchant sur le sujet de façon intellectuelle (puisque nous en sommes toujours à ce niveau!), l'abandonnique, par réflexe, se refuse le droit d'être triste: "Je n'ai pas pour habitude de m'apitoyer sur moi-même", dit-il; il ne s'autorise pas davantage à être en colère "Je ne suis pas quelqu'un de colérique." S'il accepte d'avancer dans sa réflexion, la tristesse va souvent lui apparaître comme plus acceptable - car mieux acceptée! - que la colère. Il va cependant minimiser sa tristesse; il dira, par exemple, qu'il est triste "mais pas énormément" ou que sa tristesse n'est pas assez importante pour qu'il pleure. Toutes les excuses lui sont bonnes pour ne pas accepter réellement et franchement que l'acte d'abandon qu'il a subi génère inévitablement de la tristesse.


Inutile de dire que, vis-à-vis de la colère, le mental va se déchaîner. En fait, il va tout faire pour nier cette émotion qui est pourtant au cœur de tout abandon. Tout d'abord, le mot "colère" est souvent repoussé avec force; il est en effet "trop fort" pour beaucoup de personnes. La tolère a une connotation négative, et elle est trop souvent associée à la violence verbale ou physique dont sont victimes nombre d'enfants et d'adultes. En réalité, la colère est confondue avec la rage. Il est pourtant essentiel de faire la différence entre l'émotion de colère et la rage qui est, elle, une construction de notre mentaL La famille des colères est absolument nécessaire à la vie de l'individu, au même titre que la famille des joies et celle des tristesses. L'enfant qui vient de naître n'éprouve ni peurs ni remords, il n'exprime aucune rage, pas plus qu'il ne fait de dépression nerveuse, tout simplement parce que son mental n'existe pas.

Guérir la blessure d'abandon - 12




GUÉRIR LA BLESSURE D'ABANDON (suite)
Par DANIEL DUFOUR
Extraits de son livre La blessure d'abandonLes Éditions de l'Homme, 2007

Reconnaître l'abandon

Nous avons déjà vu que l'abandonnique est passé maître dans les manœuvres d'évitement lorsqu'on aborde avec lui la cause de ses souffrances. De plus, il est très souvent parvenu à"oublier" l'événement initial. Certes, celui-ci reste parfaitement imprimé dans son subconscient, mais il n'est plus présent à sa conscience. C'est souvent à partir d'un dialogue ou d'une lecture que la personne souffrante accepte de commencer à se poser la question de savoir si elle a pu être victime d'une "chose pareille". 

Les mots ont leur importance et le mot "abandon" est le plus souvent inacceptable pour une personne souffrant d'abandonnite. Il est en effet trop fort et trop "chargé" pour pouvoir d'emblée être adopté par celle-ci. Le plus souvent, un événement vécu remonte à la surface: "C'est à la suite de la séparation d'avec ma femme que j'ai commencé à me sentir mal", me disait Jacques. Mais cet événement, pour celui qui le subit, n'est pas lié à un abandon. Il est la suite logique de ce qui a été vécu, et non vécu, par un abandonnique qui s'ignore...

Nous n'en sommes pas encore au stade de la découverte de l'abandon initial, celui de la prise de conscience de l'iceberg que cache l'événement actuel. Nous en sommes au moment de l'initiation à une démarche visant à aboutir, à plus ou moins long terme, à la découverte d'un événement premier; démarche qui doit permettre à l'abandonnique d'aller de l'avant dans la guérison définitive de son abandonnite. Nous n'en sommes encore qu'au niveau intellectuel de l'acceptation, avec le cerveau, du fait qu'il y a eu un acte d'abandon, même si le mot n'est pas celui qui est utilisé.